L’histoire possède autant de connexion magnifique qu’improbable, l’histoire et le sport en est une. L'homme ayant un goût presque inné pour le jeu, il nous semblait important d’explorer cette piste d’autant que ces sports ont beaucoup influencé nos sociétés modernes.

C’est pourquoi nous vous proposons de marcher dans les pas d’Alfred Wahl , un spécialiste de l'Allemagne contemporaine et de l'histoire du football, professeur émérite à l'université de Metz, il est un des premiers en France à signer plusieurs appels à la recherche dans ces domaines délaissés par les historiens français; il dira « le domaine était inexploré alors que beaucoup s'étaient intéressés aux maladies, à la mort, aux bas-fonds. Je trouvais cela inadmissible et sidérant »

Suite à notre émission sur l'Ulama de nos aïeux Maya, nous allons parler cette fois-ci du Cuju, sport pratiqué par nos ancêtres chinois.
Il a posé selon toute vraisemblance les premières fondations d’un des sports les plus connus et regarder au monde : le football.

Une histoire de ballons

Le jeu de Cuju fut d'abord mentionné dans le Zhanguoce (sous l'article de l'État Qi) et plus tard dans le Shiji de Sima Qian (dans la biographie de Su Qin), rédigés au cours de la dynastie Han. Certains prétendent que c'est Huángdì, l'empereur jaune qui a inventé le jeu à des fins de formation militaire, d'autres situent son apparition en Chine pendant la Période des Royaumes combattants (476-221 av. J.-C.). En tout état de cause, il existait certainement au cours de cette période. Une forme de Cuju de compétition qui servait pour l'entraînement physique de la cavalerie, alors que d'autres formes étaient jouées dans le cadre de divertissements dans les villes riches comme Linzi.

Au cours de la Dynastie des Han (206 av. J.-C.- 220 apr. J.-C.), la popularité du Cuju se répand de l'armée aux cours royales et aux classes supérieures. Il est dit que l'empereur Han Wu Di appréciait le sport. Dans le même temps, les jeux de Cuju sont standardisés et les règles sont établies. Les matchs se tenaient souvent à l'intérieur du palais. Une sorte de terrain appelé ju chang fut construit spécialement pour les matchs de Cuju, avec à chacune des extrémités six poteaux de but en forme de croissant.

Le sport a été amélioré au cours de la Dynastie Tang (618-907). Tout d'abord, la balle garnie de plumes a été remplacée par un ballon rempli d'air avec une coque à deux couches. Deux différentes sortes de poteaux de but apparaissent : l'un fait avec la mise en place de poteaux avec un filet entre eux et l'autre composé d'un seul poteau au centre du terrain.

La capitale de la dynastie Tang, Chang'an, possédait de nombreux terrains de Cuju, dans les arrière-cours des grandes demeures, et certains se trouvaient même dans l'enceinte du palais de l'ouest de Chang'an. Les soldats qui appartenaient à l'armée impériale et à la garde de l'Oiseau d'Or formaient souvent des équipes de Cuju pour le plus grand plaisir de l'empereur et de sa Cour.

Le niveau des équipes féminines de Cuju s'améliore également. Les registres indiquent qu'une fois, une jeune fille de 17 ans a battu une équipe de soldats de l'armée. Le Cuju est même devenu populaire chez les érudits et les intellectuels, et si un courtisan manquait d'habileté dans le jeu, il pouvait se faire racheter au poste de marqueur.

Le Cuju a prospéré sous la Dynastie Song (960-1279) en raison du développement économique et social, et il étend sa popularité à chaque classe de la société. À cette époque, les joueurs professionnels étaient très populaires, et le sport a commencé à prendre un tournant commercial. Les joueurs professionnels se divisaient en deux groupes : ceux formés et évoluant pour la Cour Royale (miroirs en cuivre et pots à brosse de la Dynastie Song mis au jour dépeignant souvent des représentations professionnelles) et ceux composés de civils qui vivent du fait d'être joueurs de Cuju.

Dans la Dynastie Song, seul un poteau se trouvait au centre du champ. Des organisations de Cuju sont mises en place dans les grandes villes, nommées Qi Yun She ou Yuan She – maintenant connu comme le premier club professionnel de Cuju – dont les membres étaient soit des amoureux de Cuju, soit des interprètes professionnels. Les joueurs non professionnels devaient nommer officiellement un professionnel faisant office de professeur et payer des frais pour devenir membre. Ce procédé assure un revenu aux professionnels, contrairement au Cuju de la Dynastie Tang.

Le Cuju commence à décliner au cours de la dynastie Ming (1368-1644), à cause de négligences et ce sport âgé de 2 000 ans disparaît lentement.

Victime d’une mauvaise réputation, il avait commencé à être pratiqué par des prostituées pour attirer plus de clients. Aussi, certains fonctionnaires négligeaient leur travail pour joueur au Cuju, ce qui a conduit l’empereur fondateur de la dynastie Ming à interdire ce sport.

Actuellement, le Cuju n’existe plus en Chine en tant que tel, mais une de ses variantes, le Kemari, a survécu et se joue au sein des sanctuaires japonais, « garder le ballon en l’air le plus longtemps possible » soit un objectif quelque peu différent de celui du Cuju.

Ses règles

Cuju – prononcer tsudju – signifie littéralement « taper dans le ballon avec les pieds » : Cupour « coup de pied », Ju pour la « balle de cuir fourrée de plumes » . Le jeu consistait à envoyer, avec les pieds donc, la balle dans des buts, en fait des ouvertures d'une trentaine de centimètres situées quelques mètres au-dessus du sol et fixées à de longues tiges de bambou. Il pouvait se jouer seul, en équipes s'affrontant chacune d'un côté des « buts », voire, plus rarement, les deux équipes sur un même terrain se disputant l'accès à l'unique cible. Les scores se faisaient, soit en points marqués, soit en points déduits lorsqu'un joueur commettait une erreur, par exemple faire tomber la balle au sol.

Il y a deux styles principaux de Cuju : « Zhu Qiu » et « Da Bai ».

· Le « Zhu Qiu » était couramment pratiqué lors des fêtes de la cour célébrant l'anniversaire de l'empereur ou lors d'événements diplomatiques. Un match de compétition de cuju de ce type consistait normalement en deux équipes de 12-16 joueurs de chaque côté.

· Le « Da Bai » est devenu dominant durant la dynastie Song, une approche qui attache une grande importance au développement des compétences personnelles. Marquer des buts est devenu obsolète lorsque l'on utilise cette méthode sur un terrain clos à l'aide de fils et les joueurs à tour de rôle frappent le ballon à l'intérieur de ces limites. Le nombre de fautes commises par les joueurs détermine le vainqueur. Par exemple, si le ballon ne parvenait pas à atteindre d'autres membres de l'équipe, des points étaient déduits. Si le ballon était frappé trop loin, une importante retenue du score en résultait. Frapper le ballon trop bas ou tourner au mauvais moment, tout entraîne une perte de points. Les joueurs peuvent toucher le ballon avec n'importe quelle partie du corps excepté les mains, alors que le nombre de joueurs varie de deux à dix. En fin de compte, le joueur avec le score le plus élevé gagne.

Aujourd'hui

Une question se pose alors, Qu’en est -il de la fameuse idée que la paternité du football aux anglais ?
Paul Dietschy, un historien français, spécialisé dans le domaine du sport et particulièrement du football apporte un éclairage intéressant dans les pages de So Foot, pour lui la thèse selon laquelle des colons britanniques ou des marchands ont pu observer le jeu pendant des expéditions sur la route de la soie est une hérésie, il précise son propos par les paroles suivantes : « Pour moi, c'est une ânerie, permettez-moi l'expression ! À vrai dire, c'est une chose que l’on retrouve souvent. Il y a un article dans l'encyclopédie Treccani, la grande encyclopédie italienne, consacré au Calcio Florentino qui serait à l'origine du football. On nous dit que, quand il s'est éteint au XVIIe siècle, les dernières parties ont été vues par des touristes anglais, qui auraient rapporté le jeu en Angleterre. Il y a toujours cette idée que les Anglais auraient volé le jeu aux autres. Non. Les premières formes de football, on en trouve des mentions dès le XIIIe, XIVe siècle en Angleterre. Et puis, des jeux de balle, on en trouve un peu partout. Donc à ce moment-là, on pourrait dire que Cortès et les Espagnols qui ont envahi le Mexique, ont participé à des parties de Tlachtli, et que le goût des Espagnols pour le football serait lié à ça ! »

Le 15 Juillet 2004 , la FIFA reconnait officiellement Le Shandong Zibo comme à l'origine du monde du football. Pendant la Coupe du monde 2006 en Allemagne, Sepp Blatter déclare : "Le football est originaire de Chine, Linzi est la maison du football. Le football est non seulement votre orgueil, la fierté du peuple chinois, mais aussi la fierté du monde, de fans du football et de la Coupe du monde"

Malheureusement tout n’est pas aussi limpide pour les spécialistes, beaucoup reproche à la chine une réinterprétation historique au vu du plan du président chinois pour faire de la Chine une puissance de football capable d'emporter la Coupe du monde à l'horizon 2050, ou encore des investissements massifs dans le monde professionnel ainsi que la construction de centres de formations dernier cri qui tenteraient de légitimer cette base historique.

Un plan qui aujourd’hui peine à convaincre et fait le jeu des détracteurs, moins de 0,01 % de la population chinoise est licenciée, aucun vrai bon joueur n'a jamais été produit par le pays qui se retrouve obligé de dépenser des sommes folles dans des transferts de joueurs européens ou dans des musées pour plaider sa cause.

Pour finir sur une note plus positive, si vous aimez aussi l’histoire et le sport, on vous conseille également Nikephoros (littéralement « qui porte la victoire »), une revue historique consacrée au sport antique.
Elle fut fondée en 1988 notamment par Wolfgang Decker. Un numéro est publié chaque année avec des articles en allemand, français, italien et anglais.

Sources :
- Sofoot.com
- France chine international
- Wikipédia
- Jugglepro.com